Élève d’une école secondaire au Massachusetts, et Américaine « pure laine », j’adorais mes cours de français… sauf quand on devait écrire un « schéma ». Notre enseignant, M. Bevilaqua, nous donnait un verbe à étudier en préparation d’un test le lendemain.

Arrivés en classe, on recevait par exemple la consigne suivante : « Écrivez le verbe chanter à la deuxième personne du singulier. » Et sur une feuille blanche, on écrivait de gauche à droite :

Infinitif – Présent – Passé composé – Imparfait – Futur – Conditionnel – Subjonctif

Ensuite, en bas des titres, il fallait écrire le verbe à la personne demandée. C’est comme ça que j’ai appris, entre autres, que la 2e personne à l’impératif présent des verbes réguliers dont l’infinitif se termine par « er » ne prend pas de « s ». Ainsi, on écrit « Chante ! ».

M. Bevilaqua consultait souvent un petit livre vert. Nous avons compris que ce livre contenait la clé des conjugaisons de tous les verbes français. Mais nous, les élèves, nous n’avions pas accès à ce trésor. Nous devions plutôt copier la conjugaison complète du verbe choisi que notre enseignant écrivait au tableau noir. Il va de soi que lors du test, nous n’avions plus accès à notre copie. Bien sûr, M. Bevilaqua choisissait toujours les formes les plus irrégulières pour nous piéger.

Les années scolaires ont passé. J’ai obtenu un diplôme en lettres françaises d’une université américaine de renom. Et entretemps, je suis tombée amoureuse d’un étudiant québécois, qui est devenu mon mari.

Nos trois enfants sont nés au Québec, et quand l’aîné est arrivé à l’école primaire, je me suis rendu compte que le petit livre vert de M. Bevilaqua était effectivement un Bescherelle ! Quand je corrigeais les copies de mes enfants, ils me disaient souvent : « Comment tu sais ça, maman ? » Je répondais que c’était parce que je lisais beaucoup. Je ne leur parlais jamais de M. Bevilaqua et de ses damnés schémas !

Maintenant, je suis auteure et mon Bescherelle a sa place sur mon bureau de travail, puisque, comme on le dit si bien, « la mémoire est une faculté qui oublie » !

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