Aviez-vous remarqué l’alternance d’accents dans les paires de mots suivantes : tolérance/tolère, séchage/sèche, régler/règlement, collégiens/collèges, nous interprétons/ils interprètent?

Il s’agit d’un principe très général en français : on ne met jamais d’accent grave quand la syllabe qui suit contient autre chose que le son « e » (appelé aussi « » muet); on met plutôt un accent aigu.

En effet, le è à l’intérieur d’un mot n’est possible que s’il est suivi d’une syllabe contenant -e, -es ou -ent : tolère, sèche, règlement, collèges, interprètent.

À l’inverse, devant les syllabes sonores telles que -rance, -chage, -gler, -giens, -tons, on utilise l’accent aigu et non l’accent grave : tolérance, séchage, régler, collégiens, nous interprétons.

Ce principe vaut pour toutes les sortes de mots en français : les noms (sincérité, crémage, mais crème, misère), les verbes (considérer, mais considère), les adjectifs (misérable, mais sincère), les adverbes (considérablement, mais sincèrement), etc.

Les verbes comme CÉDER

Dans la conjugaison de l’indicatif présent des verbes comme céder, sécher, régler, tolérer, digérer, etc., on observe particulièrement bien cette alternance : il y a un accent grave devant -e, -es et -ent, mais il y a un accent aigu devant les syllabes sonores -ons et -ez. Ainsi, on écrit je cède, tu cèdes, il cède, elles cèdent, mais nous cédons, vous cédez.

Qu’arrive-t-il à l’accent aigu de ce type de verbes au futur simple et au conditionnel présent?

On peut supposer qu’ils s’écrivent il cèdera, elle sèchera, ils règleront, on tolèrerait, vous digèreriez avec un accent grave, de la même façon que lever ou peser deviennent il lèvera ou on pèserait avec accent grave, par exemple. D’autant plus que, au présent, on a bien un accent grave dans cède, sèche, règle, tolère et digère (et lève, pèse aussi). La prononciation est d’ailleurs toujours « è » dans tous ces contextes. L’accent grave serait donc logique au futur et au conditionnel, comme il l’est au présent au singulier.

Eh bien! Traditionnellement, il fallait mettre l’accent aigu (ex. : il cédera, il céderait), et ce, même si tous les dictionnaires et conjugueurs s’entendaient pour dire qu’on devait prononcer « cèdera, cèderait »! C’était une incohérence.

L’Académie française a pris position et conjugue ce genre de verbes uniquement avec l’accent grave au futur simple (cèdera) et au conditionnel présent (cèderait), conformément à la prononciation. Les dictionnaires ont commencé à se mettre aussi à jour. Le logiciel d’aide à la rédaction Antidote, notamment, accepte les deux orthographes depuis 2003. Le correcteur de Word les accepte depuis 2005.

Le Bescherelle L’art de conjuguer donne évidemment lui aussi les deux façons possibles d’écrire les verbes comme céder dans leur conjugaison au futur et au conditionnel.

Les rectifications de l’orthographe du français (qu’on surnomme « nouvelle orthographe ») recommandent l’accent grave devant « e » : il digèrera, et non il digérera, car l’emploi de l’accent aigu dans ce contexte est illogique sur le plan de la prononciation et ne respecte pas les règles générales d’accentuation des mots du français.

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