Certains verbes ont une conjugaison incomplète : elle comporte des lacunes. On appelle « verbes défectifs » ces verbes qui ignorent une partie des formes de la conjugaison.

Prenons le cas du verbe traire et de ses composés : distraire, extraire, soustraire, etc. Si on veut raconter une histoire au passé composé, il n’y a pas de problème, car il s’agit d’un temps où l’auxiliaire avoir est utilisé dans la conjugaison du verbe. Par exemple :

Le scientifique a multiplié le nombre de bactéries par 10, il a additionné 35, puis il a soustrait 12.

Cependant, si on veut raconter la même histoire au passé simple, on fait face à un grave problème, à une lacune de la langue française :

Le scientifique multiplia le nombre de bactéries par 10, il additionna 35, puis il soustr(???)

Impossible, car le verbe soustraire n’existe pas au passé simple! Il n’y a pas de forme *soustraya, ni *soustrit, ni *soustrut… Non! Rien de tout cela n’existe. Il y a un manque dans le tableau de conjugaison de ce verbe. C’est bien dommage, puisque cette contrainte limite alors ce que l’on peut dire ou raconter…

Généralement, un verbe en français comprend un grand nombre de formes différentes, qui sont énumérées par la conjugaison et qui servent à donner des indications relatives au temps, au mode, à la personne, au nombre… (paragraphe 1, page 8, Bescherelle L’art de conjuguer). Mais certains verbes ont des « trous » dans leur tableau de conjugaison.

Voyons d’autres exemples.

Le verbe frire a un comportement plutôt étrange… Bien qu’on puisse le conjuguer à l’indicatif présent au singulier :

Ma sœur frit le poisson dans l’huile,

ce verbe ne peut pas être conjugué à l’indicatif présent au pluriel, ni à l’indicatif imparfait! On devra donc utiliser une autre formulation, avec le verbe faire :

Mes sœurs font frire le poisson dans l’huile.

Hier, ma sœur faisait frire le poisson dans l’huile.

Dans la longue liste alphabétique des milliers de verbes français du Bescherelle L’art de conjuguer, la lettre « D » apparait après les verbes défectifs, pour signaler qu’ils ont des manques dans leur conjugaison.

Voyez, par exemple, accroire, malfaire et quérir : on y dit qu’ils ne s’emploient qu’à l’infinitif. En effet, ces verbes ne se conjuguent plus de nos jours, ils ne connaissent qu’une seule forme : l’infinitif.

Petite anecdote : étrangement, le verbe clore et sa famille avaient des « trous » dans leur tableau de conjugaison, notamment au passé simple et à l’imparfait, parce que ces formes étaient rares ou désuètes. Depuis l’édition 2006, les « trous » ont été remplis dans le Bescherelle L’art de conjuguer, afin de limiter les exceptions inutiles. Si une forme existe (comme les fleurs éclosaient), elle a sa place dans le tableau de conjugaison du verbe, même si elle est rare.

Le paragraphe 28 du Bescherelle L’art de conjuguer, à la page 39, donne une liste de tableaux de verbes qui sont défectifs ou qui ont des formes devenues désuètes.

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