Si vous regardez tous les tableaux de conjugaison du Bescherelle L’art de conjuguer, vous remarquerez que quelques verbes ont des « trous » dans leur tableau. En effet, certains verbes ne peuvent pas être conjugués à tel temps, à tel mode ou à certaines personnes.
Observez le verbe aller, dont la conjugaison est complète. Si vous excluez ses temps composés (passé composé je suis allé, plus-que-parfait nous étions allés, etc.), vous constaterez que son tableau contient environ 50 éléments de conjugaison sous une forme simple. En effet :
– On lui attribue six conjugaisons au présent de l’indicatif : je vais, tu vas, il va, nous allons, vous allez, ils vont. De même à l’imparfait de l’indicatif : j’allais, tu allais, elle allait, nous allions, vous alliez, elles allaient. Et ainsi de suite pour le futur simple (six formes, par exemple elle ira), le passé simple (six formes, notamment il alla) et le conditionnel présent (six conjugaisons, dont on irait).
– On attribue également à ce verbe six conjugaisons au présent du subjonctif (que j’aille…) et six formes à l’imparfait du subjonctif (que j’allasse…).
– À l’impératif présent, le verbe ne connait que trois formes : va, allons, allez.
– Au participe présent, il a une forme unique : allant (invariable).
– À toutes ces formes des temps simples de la conjugaison s’ajoute celle du participe passé (allé), qui connait parfois aussi le féminin et le pluriel : allée, allés, allées.
Or, contrairement aux verbes aller ou aimer ou finir, un certain nombre de verbes comportent des lacunes dans leur conjugaison : elle est, à des degrés divers, incomplète. On les appelle des verbes « défectifs », c’est-à-dire « comportant un manque ». (paragraphe 27, page 39, L’art de conjuguer)
C’est le cas du verbe gésir. Il se conjugue au présent et à l’imparfait : la victime git sur le plancher, elle gisait là. Mais ce verbe n’existe pas au futur! Il n’y a pas de forme *gésira, ni *gira, ni *gisera… On dira plutôt : elle va gésir là.
Autre exemple : le verbe pouvoir ne peut pas être utilisé à l’impératif. On peut donner l’ordre à quelqu’un de manger (Mange!), de partir (Pars!), de dormir (Dors!), mais on ne peut pas lui donner l’ordre de pouvoir : le verbe pouvoir à l’impératif n’existe pas. On compensera cette lacune par d’autres procédés expressifs, comme Puisses-tu escalader cette montagne sans tomber ou Puissions-nous réussir!
Pour leur part, les verbes dits « impersonnels » (il grêle, il vente) sont défectifs pour la personne. Voyez le tableau de falloir : il n’existe qu’à la 3e personne du singulier. Conséquemment, il a des lacunes aussi pour le mode : un verbe impersonnel n’a pas d’impératif, puisque l’impératif n’existe pas la 3e personne.
Dans la dernière partie du Bescherelle L’art de conjuguer, on trouve l’index alphabétique de tous les verbes du français. La lettre « D » après certains verbes de cette liste sert à indiquer qu’ils sont défectifs : leur conjugaison est incomplète.