Voilà une règle de l’orthographe française qui se décline tout en subtilité ! En effet, selon la signification que l’on prête à l’expression « avoir l’air », l’adjectif qui la suit s’accorde avec le sujet du verbe avoir, qu’il s’agisse d’une personne ou d’un objet, ou bien s’accorde avec le mot air, si c’est celui-ci qu’il qualifie.

Explorons cette règle plus précisément :

1.- Lorsque l’expression prend le sens de sembler ou de paraître, l’adjectif qui la complète s’accorde avec le sujet.

  • Victor Hugo nous en fournit un exemple dans La Légende des siècles, alors qu’il dépeint une gigantesque et lugubre salle à manger : « La lumière a l’air noire et la salle a l’air morte.»  
  • Dans cette acceptation, l’expression s’accorde également avec le sujet du verbe avoir, même si le verbe « être » est intercalé. René Bazin l’utilise de cette façon dans Il était quatre petits enfants, un livre de lecture courante qu’il écrivit à l’attention des élèves du cours élémentaire et moyen : « La maman avait l’air d’être si sûre de ce qu’elle disait ! »
  • Toutefois, même dans ce cas, l’accord de l’adjectif avec le nom air n’est pas fautif. Pierre Loti en donne une illustration dans Ramuntcho: « On les conduit à leurs petites chambres qui ont l’air honnête. »

2.- Lorsque l’on donne au nom « air » le sens de mine, de physionomie ou encore d’allure, alors l’adjectif s’accorde avec lui. Dans ce cas, on peut remplacer l’expression par : « avoir un air… ».

  • Victor Hugo l’emploie de la sorte dans son volumineux recueil de notes intitulé Choses vues, qui fut publié après sa mort, en évoquant l’ambassadrice d’Angleterre : « Elle avait l’air très fâché. »
  • Au demeurant, l’adjectif s’accorde nécessairement avec « air », quand il est accompagné d’un complément. Exemple : « Elle avait l’air hardi et content d’elle-même », commente George Sand dans La mare au diable, à propos de la veuve Guérin.
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